Nouvelles analyses de pollens et propolis

Carine MASSAUX

Le laboratoire du CARI étend ses analyses à des produits de la ruche autres que le miel et vous propose des analyses de propolis et pelotes de pollens.

Le miel est le produit phare que tout apiculteur récolte. En parallèle, la récolte d’autres produits de la ruche, tel que la propolis et le pollen, représente une diversification intéressante à envisager. Il existe en effet une demande croissante sur le marché pour ces produits. Dans cette optique, le laboratoire du CARI travaille depuis quelques mois pour maîtriser des analyses visant à évaluer la qualité de ces produits et peut maintenant vous aider à mieux connaître leurs caractéristiques. La plupart des analyses développées sont reprises dans les futures normes internationales qui sont encore à l’étude et qui seront publiées en vue de mieux cadrer la qualité de ces produits importants de la ruche.

La propolis, une grande biodiversité à contrôler

La propolis trouve son origine dans les résines récoltées par les abeilles sur les bourgeons et l’écorce de différents arbres. A l’intérieur de la ruche, les abeilles transforment laborieusement ces résines avec leurs propres sécrétions afin d’obtenir la propolis. Dans nos régions, beaucoup d’arbres sont visités par les abeilles pour la propolis : bouleau, chêne, peuplier, frêne, saule, marronnier, pin… La propolis est généralement brune et considérée comme une propolis venant principalement des peupliers. Mais son origine est rarement monospécifique et elle présente donc une grande variabilité, ce qui la rend assez difficile à standardiser. En plus de son origine botanique, son âge, la technique de récolte, son origine géographique vont également modifier ses constituants.
On lui reconnaît généralement une valeur comme produit biologique actif en tant qu’antioxydant, détoxifiant, anti-inflammatoire, cicatrisant, immunostimulant, biorégulateur… mais ces effets bénéfiques sont cependant directement fonction des teneurs en principes actifs qui composent la propolis. La pureté et la qualité initiale du produit à l’état brut sont donc essentielles. Si elle est par exemple récoltée avec trop de cire ou si elle est présente depuis trop longtemps dans la ruche, son efficacité sera réduite. La propolis est généralement commercialisée à l’état brut ou sous forme de teinture ou d’extrait de propolis. Pour obtenir la teinture, la propolis est mise en macération dans de l’alcool. La qualité et la concentration de l’extrait obtenu seront directement liées à la quantité de propolis et au degré d’alcool employé. Certains préconisent d’employer un alcool à 96° qui permet d’extraire essentiellement les composés solubles dans l’alcool (mais insolubles dans l’eau). D’autres conseillent plutôt d’utiliser un alcool à 60 - 70° pour extraire l’ensemble des composés intéressants de la propolis. Le temps de macération appliqué est également important. La littérature recommande souvent 10 à 30 % de propolis dans de l’alcool à 96°, avec deux semaines de macération. Tandis que le Dr Christina Aosan (Membre de la Commission d’apithérapie d’Apimondia, Roumanie) prône la patience pour préparer une bonne teinture et recommande 30 % de propolis dans de l’alcool à 60 - 70°, avec une macération d’au moins deux mois. Inutile de vous préciser qu’en production industrielle, un processus si long de macération n’est pas appliqué et les teintures tendent à perdre en qualité. La qualité de l’extrait de propolis peut donc être très variable également. Dans le commerce, le constat est inquiétant : 96 % des étiquettes donnent de mauvaises indications sur le contenu en propolis dont plus de la moitié ne donne aucune information sur la teneur en propolis. Une capacité anti-oxydante trop faible est également observée pour plus d’un tiers.
Les exigences requises pour atteindre une certaine qualité de la propolis ou de son extrait sont difficiles à bien définir. Une commission normative internationale, dont Etienne Bruneau fait partie, y travaille actuellement. Elle se réunit régulièrement depuis un an pour définir les exigences de qualité, les procédures des méthodes d’essai, les conditions de transport et de stockage,… des bases seront ainsi mises en place dans le futur pour la classification et le contrôle de la qualité de la propolis brute et dans un second temps des extraits de propolis.

Polyphénols et flavonoïdes
La composition chimique de la propolis est assez complexe. Des centaines de composés naturels, tels que les polyphénols et les flavonoïdes, ont été isolés et identifiés dans la propolis, composés dont les teneurs varient en fonction des sources végétales, de l’origine géographique, de l’espèce d’abeille, de la méthode d’extraction…
Les polyphénols représentent les principaux ingrédients actifs de la propolis. Au laboratoire du CARI, nous avons donc porté une attention particulière au développement du dosage de ces molécules naturelles largement présentes dans le règne végétal. La propolis est très riche en ces substances, notamment en flavonoïdes, acides phénoliques et dérivés, qui présentent une activité anti-oxydante élevée. Ces molécules sont ainsi capables d’interagir avec les radicaux libres de notre organisme et fournissent à nos cellules une protection contre les méfaits causés par le vieillissement ou l’exposition prolongée à des éléments tels que les infections, les rayons UV du soleil, la pollution... La mise en évidence et le dosage de ces composés est donc importante pour évaluer la qualité d’une propolis : plus elle sera riche en polyphénols et flavonoïdes, plus son activité bénéfique sera élevée. Au niveau légal, il sera donc important de fixer une teneur minimale à atteindre en ces composés. La littérature scientifique propose actuellement des valeurs minimales de 21 g en polyphénols et de 4 g en flavonoïdes par 100 g de propolis brute issue du peuplier.

Pureté de la propolis
En complément de ces analyses de composition, différentes analyses destinées à mettre en évidence la pureté de la propolis ont également été développées au laboratoire.
Le poids des composés extraits à l’éthanol représente la quantité obtenue après un processus d’extraction utilisant un mélange éthanol/eau (70 % éthanol et 30 % eau). Ce résultat indique l’aptitude de la propolis à donner un extrait alcoolique riche en composés actifs. Plus cette valeur est élevée, plus l’extrait est riche. Actuellement, une valeur minimale de 40 g/100 g de propolis est préconisée.
La teneur en cendres représente les composés incombustibles restant après la combustion complète à 600°C d’un échantillon de propolis brute. Des valeurs élevées peuvent indiquer une falsification possible de la matière par la présence d’impuretés, voire de résidus inorganiques provenant des procédures de récolte. Une valeur maximale de 5 g/100 g de propolis est conseillée.
La teneur en cire dans la propolis est également importante à doser. Une valeur trop élevée n’est bien sûr pas recherchée car il s’agira alors de propolis à la cire, ou pire de cire à la propolis. Un maximum de 20 % de cire est généralement toléré dans la propolis.


Le pollen, des qualités à préserver

Parmi les produits de la ruche, le pollen représente également un produit intéressant à valoriser. Très complet, il renferme tous les nutriments nécessaires à la croissance et au développement des abeilles : sucres, protéines, vitamines, acides aminés, lipides, enzymes, minéraux et oligo-éléments,… Le profil nutritionnel du pollen est par conséquent aussi intéressant pour notre alimentation. Il est d’ailleurs considéré comme un complément alimentaire de haute valeur nutritive et peut parfaitement compenser les insuffisances liées à notre alimentation moderne. Sa composition nutritionnelle est cependant très variable d’un pollen à l’autre, principalement en fonction de son origine botanique mais également en fonction des traitements de récolte et de conditionnement qui lui sont appliqués. A la sortie de la trappe à pollen, qui est la technique de récolte la plus utilisée, les pelotes doivent être nettoyées de tout élément étranger tel que pattes, ailes, gravier, poussières,… Le pollen récolté contient à ce stade trop d’humidité et ne peut pas se conserver tel quel. Il est donc indispensable de le déshydrater (par séchage à 40° C) ou de le congeler pour éviter le développement de moisissures et assurer sa bonne conservation. Le séchage peut induire des modifications plus ou moins marquées en fonction des conditions plus ou moins poussées qui sont appliquées (combinaison optimale de temps, température, ventilation et humidité ambiante à définir). Il est par contre démontré que la congélation ne cause pas de changement significatif sur la composition nutritionnelle du pollen et est par conséquent recommandée.
Comme pour la propolis, une commission normative internationale ISO, qu’Etienne Bruneau a intégrée, se réunit régulièrement pour définir les exigences requises afin de commercialiser un pollen de bonne qualité. Lors de ces réunions, les méthodes d’essai à appliquer sont également discutées et définies. Le laboratoire du CARI a travaillé au développement de plusieurs de ces méthodes.

Origine du pollen
Pour déterminer correctement l’origine botanique des pelotes de pollen, une analyse palynologique s’avère très utile. En première approche, la couleur apporte déjà une première indication sur la diversité des pelotes. Mais il faut savoir que la couleur d’une même espèce botanique peut varier légèrement en fonction de sa maturité et par ailleurs, une couleur similaire peut être présentée par plusieurs espèces. L’analyse palynologique reste donc le moyen le plus fiable pour identifier l’origine florale des pelotes de pollen, et les classer en pollen dominant ou multifloral. Dans cette analyse, pour évaluer le pourcentage de pollen dominant, l’identification du grain de pollen est bien sûr importante mais il faut également tenir compte de sa taille. Pour les pollens les plus fréquents (taille comprise entre 20 et 40 µm), le pourcentage requis est de 80 %. Pour un grain de pollen inférieur à 20 µm comme le châtaignier, 96 % de pollen de cette espèce végétale seront par exemple nécessaires pour obtenir un monofloral, alors que seulement 7 % seront demandés pour un pollen de diamètre supérieur à 85 µm comme le maïs. Ces valeurs ont été récemment proposées en commission normative par Etienne Bruneau et validées.

Teneur en enzymes
Les enzymes contenues dans le pollen, et notamment la saccharase (ou invertase), donnent des renseignements utiles. Sensibles à la chaleur et au vieillissement, la teneur en cette enzyme reflète en effet l’âge et le passé thermique du pollen.
La méthode de détermination de l’indice de saccharase, déjà appliquée en routine pour le miel dans notre laboratoire, a subi quelques adaptations afin d’être transposée à la matrice « pollen ». Après différents essais, les derniers résultats obtenus sont très probants. L’analyse de l’indice de saccharase peut par conséquent être appliquée comme nouveau test discriminant pour mettre en avant la bonne qualité du pollen.


Pureté et conservation du pollen
L’humidité est une caractéristique importante à connaître pour évaluer l’aptitude du pollen à une bonne conservation. Un maximum de 8 % est conseillé pour les pollens séchés et de 25 % pour les pollens frais ou congelés.
Comme pour la propolis, une teneur en cendres trop élevée est une indication de la présence d’impuretés d’origine minérale, liée à un mauvais nettoyage du pollen récolté. Un maximum de 6 % est préconisé.
La teneur en lipides dans le pollen est également un paramètre important à doser. Très variable en fonction de l’origine botanique du pollen, elle est généralement de l’ordre de 5 à 10 % dans un pollen séché. Pour ce paramètre, un minium de 1,5 % est recommandé.

Par ces analyses, le CARI souhaite vous donner les outils nécessaires pour mieux connaître les caractéristiques de vos récoltes de propolis et pollens. Vos produits seront ainsi mieux différenciés sur un marché de plus en plus compétitif, confronté à des produits standardisés dont la qualité est souvent d’un niveau plus faible.

Venez tester au CARI vos pollens et votre propolis

Dans le cadre de la mise au point de deux nouveaux bancs d’analyses sur le pollen et la propolis et afin de lancer un programme de caractérisation de ces deux produits récoltés en Wallonie et à Bruxelles, n’hésitez pas à nous envoyer un échantillon de pollen (200g) et/ou un de propolis (100 g).
Nous les analyserons gratuitement durant cette phase de tests prévue durant les
4 prochains mois (jusqu’à fin 2021). Cette offre est limitée à un échantillon de chaque produit par apiculteur.
Pour chaque échantillon de pollen et de propolis, veuillez indiquer clairement vos nom et coordonnées, la date de production, le lieu de récolte, le mode de récolte (grille à propolis ou grattage ou…) et les opérations effectuées sur le produit (par ex. tri, séchage, …).
Un bulletin de demande d’analyses reprenant ces informations sera disponible sur le site : cari.be – laboratoire.

N’hésitez donc pas à nous envoyer vos produits nous aidant ainsi à peaufiner nos futurs bancs d’analyse et vous aidant à mieux connaître votre production.

Références bibiographiques

  • Vassya Bankova, Davide Bertelli, Renata Borba, Bruno José Conti, Ildenize Barbosa da Silva Cunha, Carolina Danert, … 2019. Standard methods for Apis mellifera propolis research. Journal of Apicultural Research, Vol. 58, No. 2, 1–49
  • Milena P. Popova, Vassya S. Bankova, Stefan Bogdanov, Iva Tsvetkova, Christo Naydenski, Gian Luigi Marcazzan et Anna-Gloria Sabatini. 2007. Chemical characteristics of poplar type propolis of different geographic origin. Apidologie 38 : 306– 311
  • Bogdanov S. 2014. Pollen : production, nutrition and health : a review. Bee product science, 3.
  • Campos M.G.R., Bogdanov S., de Almeida-Mura-dian L.B., Szczesna T., Mancebo Y., Frigerio C. and Ferreira F. 2008. Pollen composition and standardisation of analytical methods. Journal of apicultural research and bee world 47(2) :154-161