Pour un avenir de l’apiculture wallonne

Agnès Fayet

Nous nous trouvons aujourd’hui face à un tournant. Le Service public de Wallonie et les différents représentants des apiculteurs wallons travaillent depuis presque un an à la direction que prendra l’avenir de l’div class="encadre"><pment de l’apiculture en Wallonie (et à Bruxelles pour le Programme d’aide européen). Essayons de décortiquer les mécanismes complexes qui sont en jeu.

La révision des conditions d’accès aux aides européennes

Les dernières lignes pour la révision de l’aide européenne sont en cours de rédaction en ce mois de juin. Le Pro gramme apicole wallon (PAW), dénomi nation qui remplace le Programme Miel européen, est un enjeu important. Au niveau européen, l’apiculture rejoint la Politique agricole commune (PAC) et doit donc désormais jouer dans la cour des grands. En clair, le budget attribué à l’apiculture wallonne dépendra désormais du fond de la PAC. Pour pouvoir prétendre à ce budget, la Commission européenne a des exigences à la fois sur le fond et la forme du document qui devra être remis par la Région Wallonne en accord avec le secteur. Il faut, en particulier, décrire au mieux la situation qui est celle de l’apiculture wallonne aujourd’hui :

  • Quelle est sa nature ?
  • Quels sont ses besoins ?
  • Quelles priorités sont accordées à ces besoins ?
  • Quelles actions sont proposées pour répondre aux besoins identifiés ?

Une analyse précise de la situation api cole en Wallonie était nécessaire. Elle a été réalisée dans le cadre du projet Bee Wallonie. Ce chantier a commencé en juillet 2020. Le travail a abouti à la rédaction de deux documents :

  • L’apiculture en Wallonie : contexte, analyse et pistes d’action (document de 115 pages validé par le secteur au printemps 2021 au terme d’échanges et de négociations) ;
  • Plan de développement stratégique pour l’apiculture wallonne 2020-2030 (document de 68 pages finalisé fin mai 2021 après consultation d’un panel de parties-prenantes et approbation par les représentants du secteur apicole ).

La réflexion qui a conduit à ce travail de fond permet aujourd’hui de répondre aux exigences européennes pour que le secteur puisse prétendre aux aides de la nouvelle PAC 2022-2027. Il fallait pour ce faire intégrer ce qu’on appelle une analyse SWOT. C’est une matrice, une
synthèse, une méthode d’analyse qui a permis d’envisager :

  • Les Forces (STRENGHTS) du sec teur apicole : quels avantages pré sente-t-il aujourd’hui ?
  • Ses Faiblesses (WEAKNESSES) : qu’est-ce qui le désavantage ?
  • Les Opportunités (OPPORTUNITIES) qui se présentent à lui : quels éléments extérieurs positifs pourraient être un avantage pour le secteur ?
  • Les Menaces (THREATS) qui pèsent sur le secteur : quels éléments extérieurs pourraient lui causer des problèmes ?

Au fil de la réflexion, il est apparu claire ment que les apiculteurs de loisir, majoritaires en Wallonie et majoritairement représentés dans les comités d’accompagnement des projets apicoles, ont une vision naturellement centrée sur leur situation et peu sur l’idée même de développement économique d’une filière apicole. De ce fait, deux versions de l’analyse SWOT ont été réalisées pour bien faire émerger la réalité de tous les acteurs. Un SWOT 1 considère la situation générale indépendamment de la dimension économique et un SWOT 2 est davantage orienté vers un développement économique. Pour clarifier la
notion d’apiculture à dimension économique et après discussion avec les parties prenantes, une échelle d’évaluation (voir tableau ci-dessous) permet de proposer des catégories basées sur le nombre de colonies à l’hivernage. On peut parler d’une « apiculture à dimension économique » au-delà de 10 ruches. Les apiculteurs professionnels sont minoritaires et sans structure de représentation à l’heure actuelle. Les apiculteurs à dimension économique constituent cependant près d’un tiers de la population apicole (% basés sur les moyennes de dénombrements sur 5 ans de 610 apiculteurs) et participent à près des trois quarts de la production. Il était donc bien justifié d’envisager les points de vue de tous les acteurs du secteur.

Pour répondre aux attentes euro péennes, les deux analyses SWOT ont été ramenées à une seule avec une prio risation des besoins et une liste d’actions proposées pour répondre à ces besoins. Le travail est toujours en cours à l’heure où nous rédigeons ce texte. Les rapports, dans leur intégralité, sont disponibles sur le site https://www.beewallonie.be.


La fin de la convention cadre du projet Bee Wallonie

Depuis de nombreuses années, le sec teur apicole est encadré par plusieurs programmes et projets visant à le sou tenir et à le développer. Depuis 2009, plusieurs plans d’aide aux apiculteurs wallons ont permis de mettre en place une structure d’accompagnement au niveau de la formation, de l’information et de l’aide structurelle et sanitaire. Le secteur apicole wallon est doté de précieux atouts qu’il est nécessaire de préserver, de stimuler tout en améliorant la connaissance que l’on a des différents acteurs. Le projet Bee Wallonie (https:// www.beewallonie.be), porté conjoin tement par le CARI et le Centre wallon de recherches agronomiques (CRA W), s’inscrit dans le prolongement de 7 années d’aide régionale au secteur apicole. Il se termine à la fin de cette année 2021. Un état des lieux et une synthèse des différentes actions réalisées seront présentés au secteur durant l’automne 2021.

Le projet est distribué en 2 volets d’actions. Le premier volet concerne le « soutien et le développement du secteur apicole ». Il permet plusieurs actions de soutien parmi lesquelles :

  • l’installation puis le suivi d’un réseau de ruchers de sauvegarde (ruchers tampons) gérés par des sections volontaires ;
  • la réalisation d’une analyse, suivie d’un rapport complet sur l’apiculture wal lonne ;
  • des enquêtes de terrain valorisant les initiatives wallonnes ;
  • la diffusion d’informations en continu, en particulier sur le blog butine.info ; - la réalisation de supports didactiques comme des vidéos destinées à valoriser le travail des apiculteurs et leur expertise ;
  • l’organisation de campagnes annuelles de soutien direct au secteur :
    • matériel d’élevage destiné aux associations (19.796 €)
    • trinoculaires à usage didactique pour les ruchers écoles (8.353 €) • ruches et ruchettes pour les ruchers écoles (8.471 €)
  • etc.

Le second volet concerne la « santé de l’abeille, l’agriculture et l’environne ment ». Il permet un div class="encadre"><pment des dossiers concernant le suivi sanitaire des colonies, l’écotoxicologie et la prophylaxie :

  • Lutte contre le frelon asiatique (des truction des nids) et la diffusion d’in formations à ce sujet ;
  • Disponibilité des produits sanitaires ; - Construction d’un outil d’aide à la déci sion pour le contrôle du varroa dans une logique de lutte intégrée ;
  • Diffusion et dépouillement de l’en quête COLOSS sur les dépérissements hivernaux ;
  • Echantillonnage (miels, différentes matrices pour analyse des résidus dans les CIPANS, etc.) ;
  • Etc.

Une présentation des différentes réalisations est prévue cet automne. Nous vous tiendrons au courant.

Quelles sont les perspectives pour 2021 et au-delà ?

Le Plan pour l’Apiculture Wallonne (PAW), nom choisi par le Service public de Wallonie pour désigner le Programme Miel Européen, est en phase finale de négociation. Si le budget a été fortement augmenté, le challenge régional est d’as sumer le co-financement nécessaire et de mettre en place la nouvelle structure administrative. Pour les opérateurs, le CARI et Arista Bee Research Belgium, le défi est de mettre en place les actions élargies, incluant de nouveaux services et une extension de certains autres, le tout dans un contexte d’ajustement bud gétaire très inconfortable pour les associations.

Pour Bee Wallonie, les lignes d’une deuxième convention cadre démarrant en janvier 2022 restent à définir. Elles le seront en ce début d’été et les représen tants du secteur seront consultés.