VOYAGE 6 : Se diversifier avec la gelée royale

Etienne BRUNEAU

Installée depuis 1980, l’exploitation apicole de Philippe Milliot et de son épouse Annie se situe non loin de La Rochelle en pleine zone agricole. Avec son BTS agricole en poche, et intéressé par les abeilles il a sa première ruche en 1980. Il réalise dans la foulée un stage chez un apiculteur professionnel. Suite à cela, il a rapidement développé son cheptel pour atteindre 200 colonies. Deux à trois ans après, le couple avait 400 colonies. A cette époque, ils faisaient partie des gros apiculteurs, aujourd’hui la moyenne est de l’ordre de 700 à 800 ruches et son voisin proche en a 3500.


Philippe et Annie Milliot
La Burgauderie
17 470 Cherbonnières,
05 46 26 36 72,
philannie chez wanadoo.fr

La première miellée se fait sur colza puis il transhume sur acacia et châtaignier avec 40 à 50 ruches. La seconde miellée importante est le tournesol. Depuis les années 80, la biodiversité n’a fait que diminuer (disparition des haies…). La production de miel de tournesol a chuté en passant de 50 à 80 kg par ruche, à 25 à 30 kg aujourd’hui. La ressource est moins abondante. Avant, la coopérative de Surgère centralisait une grande partie de la production de miel de tournesol de la région. Elle le revendait à France Miel qui se chargeait de la vente. Pour l’instant, les zones à risques sont avant tout les zones viticoles. Le tournesol ne semble plus poser de problèmes comme par le passé où ils constataient des ruches vides.


Les conditions difficiles liées à la régression de la biodiversité, à l’arrivée de Varroa destructor et à la diminution de production du tournesol a provoqué une augmentation du travail dans les ruches et nécessite aujourd’hui de produire chaque année 200 à 300 essaims avec un élevage de reines en parallèle pour compenser les pertes.

Il y a quelques années, ils vendaient en gros et avaient développé un marché basé sur de petites coupelles de miel vendues en hôtellerie. Il déservait ainsi des chaînes comme Campanile…

Aujourd’hui, ils vendent au détail dont une fois par semaine sur un marché qui leur permet d‘écouler l’essentiel du miel.

Suite à la chute des prix des miels, ils ont décidé de se lancer dans la production de gelée royale. Un stage en Italie en 2002 leur a permis de démarrer la production en 2003. Depuis le début, ils sont membre du Groupement des Producteurs de Gelée royale. Le GPGR leur a permis d’accélérer la prise de connaissances et d’avoir des avancées techniques très conséquentes. Aujourd’hui, ils ont de 60 à 80 ruches en production de gelée royale ce qui représente les deux-tiers de leur chiffre d’affaire. Ils travaillent avec de la Buckfast pour la production de miel mais avec des lignées italiennes du GPGR pour la gelée royale. Les lignées utilisées pour la production de gelée font l’objet d’un programme de sélection géré par le GPGR. L’objectif est d’avoir une abeille autonome capable de produire 40 à 50 g de gelée. C’est naturellement moins que les 80 g que peuvent avoir certaines lignées continuellement sous perfusion.


Ils travaillent avec des ruches Dadant 10 cadres divisées en deux parties : 5-5 ou 6-4 cadres.

La partie « reine » est haussée ou a un nourrisseur. Des cadres de hausse de colza sont conservés pour alimenter les hausses avec du miel pour assurer un approvisionnement continu et répondre à la qualité de la gelée. Ces abeilles productives consomment beaucoup.

Le calendrier d’élevage comprend 2 levées à 3 jours d’intervalle. En pratique : mise en élevage le mardi matin, récolte le vendredi après-midi et greffage le vendredi matin et récolte le lundi après-midi. Les moments sans production sont affectés à l’élevage de reine.

Toutes les semaines, il faut réaliser le passage des cadres pondus vers la partie orpheline et les remplacer par des cadres vides.

Toutes les reines sont marquées et clipées. 90 % sont inséminées car il est impossible de saturer l’environnement en mâles. Leurs élevages sont utilisés en interne.

Le laboratoire compte 5 postes de travail. Ils travaillent avec le picking chinois. Ils utilisent un mélange de gelée et d’eau très pure pour éviter le déssèchement (reste 3 h au laboratoire). Ils utilisent 14 colonies pour faire le picking. Ils travaillent avec de petits ensembles de 10 cellules attachées par un fil inoxydable sur la barrette. Les barrettes sont disposées sur un plateau recouvert d’un linge humide. Le positionnement final des barrettes se fait au rucher.


Le travail doit se faire à l’heure près. Si 60 à 80 colonies sont en production, ils en conservent 150 en réserve pour être certains de pouvoir les remplacer en cas de problème. Ainsi, ils parviennent à produire de 50 à 80 kg de gelée royale par an en débutant la production début avril jusqu’au 15 juillet. Les récoltes de chaque ruche sont pesées pendant 1 mois et on évalue le taux d’acceptation. Les données sont transmises au GPGR pour leur plan de sélection.

Pour le traitement de la varroase, ils ne font rien en saison puis ils utilisent l’Apivar pendant 12 semaines. En hiver, ils font un traitement avec l’acide oxalique. Ils ont également utilisé le Bee Vital Hive Clean ponctuellement. Un test d’encagement des reines a aussi été effectué sur une trentaine de colonies couplé à un traitement à l’acide oxalique en dégouttement.

Côté vente, le marché français est inondé par la gelée royale chinoise (175 tonnes) contre 2 tonnes pour la gelée royale française. Le concurrence est sévère. Les prix sont fondamentalement différents. Ici, ils vendent 10 g en vente directe à 20 € et 25g à 45 €.

Nous tenons à remercier tout particulièrement ce couple charmant pour leur ouverture et leur gentillesse lors de notre accueil.