Bilan Pertes hivernales 2017-2018

Noa SIMON, Gilles SAN MARTIN, Eliane KEPPENS

Selon les réponses au questionnaire COLOSS sur les pertes hivernales, la saison 2018 a commencé avec 19.4 % de colonies en moins qu’attendu, 11.8 % si on tient compte du nombre de réponses par commune.

Après cette arrière-saison très chaude et sèche, il va falloir être vigilant et surveiller comment les colonies vont passer l’hiver. Dans cet article, nous vous présentons les résultats obtenus sur base des réponses fournies dans le questionnaire de la saison 2017-2018.

L‘intervalle de confiance donne une idée de la précision de l‘estimation. Une perte de 25 % [20 %-30 %] indique que les pertes observées sont de 25 % et que si on pouvait recommencer un grand nombre de fois le questionnaire, les pertes moyennes seraient comprises entre 20 et 30 % dans 95 % des cas. La différence entre mortalité observée et mortalité estimée vient du fait que la deuxième est corrigée selon le taux de réponses par commune. Imaginez par exemple qu’on a reçu pour une commune seulement une seule réponse pour un rucher de deux colonies qui sont toutes les deux mortes pendant l’hiver. Dans ce cas la mortalité observée pour la commune sera de 100 % mais ce chiffre basé seulement sur 2 colonies n’est sans doute pas très représentatif de la mortalité dans toute la commune. On utilise donc un outil mathématique pour calculer la mortalité « estimée » qui va corriger cette valeur pour la rapprocher de la moyenne nationale en particulier quand on a reçu très peu de réponses. Le même outil est utilisé par COLOSS à l’échelle européenne

Comme c’est le cas depuis des années, le bilan des pertes hivernales nous montre une situation très variable selon les régions. En 2017-18, nous avons continué une approche nationale grâce à la collaboration entre la FAB-BBF (Belgique), « Honeybee Valley » et le Konvib (Flandre), et le CARI et le CRA-W (Wallonie). Après vérification des données, nous avons pu utiliser 482 réponses pour ces analyses sur un peu plus de 593 réponses reçues. Le nombre de réponses a diminué par rapport à l’année précédente (689 réponses utilisables en 2016-17). Une nouvelle interface d’encodage en ligne a été utilisée cette année et il se pourrait que le questionnaire n’ait pas été suffisamment accessible aux utilisateurs. Nous allons faire de notre mieux pour améliorer le questionnaire de pertes hivernales 2018-19, qui sera lancé au début du printemps.


La Belgique apparaît encore en 2017- 18 comme un patchwork montrant des zones indemnes de pertes et des zones de pertes plus importantes (cartes). Les réponses obtenues montrent un taux de mortalité observé moyen par province qui varie entre 6.9 % [3.7 %-12.3 %] dans le Luxembourg et 42.5 % [29.1 %-57.1 %] dans la région de Bruxelles-Capitale. Une étude plus approfondie menée par la SRABE dans la région de Bruxelles-Capitale montrerait un taux de mortalité encore plus élevé. La moyenne nationale est de 19.4 % [17.2 %-21.7 %], plus basse que la moyenne de l’hiver précédent (25.5 % [23.5 %-27.7 %]).

L‘intervalle de confiance donne une idée de la précision de l‘estimation. Une perte de 25 % [20 %-30 %] indique que les pertes observées sont de 25 % et que si on pouvait recommencer un grand nombre de fois le questionnaire, les pertes moyennes seraient comprises entre 20 et 30 % dans 95 % des cas. La différence entre mortalité observée et mortalité estimée vient du fait que la deuxième est corrigée selon le taux de réponses par commune. Imaginez par exemple qu’on a reçu pour une commune seulement une seule réponse pour un rucher de deux colonies qui sont toutes les deux mortes pendant l’hiver. Dans ce cas la mortalité observée pour la commune sera de 100 % mais ce chiffre basé seulement sur 2 colonies n’est sans doute pas très représentatif de la mortalité dans toute la commune. On utilise donc un outil mathématique pour calculer la mortalité « estimée » qui va corriger cette valeur pour la rapprocher de la moyenne nationale en particulier quand on a reçu très peu de réponses. Le même outil est utilisé par COLOSS à l’échelle européenne.


Si on regroupe les ruchers par région naturelle plutôt que par province, on constate que les régions où l’on nous a rapporté le plus de pertes sont la zone limoneuse (30.2 % [26.2 %-34.6 %]), suivie en deuxième position (comme en 2016-2017) par le Condroz (24.4 % [18.6 %-31.3 %]). Pour rappel, l’année précédente, la Famenne avait été la région la plus touchée (50.9 % [33.6 %-68 %]). A l’opposé les taux de mortalités rapportés sont les plus faibles en Lorraine (5.1 % [1.5 %-16.5 %]), Ardenne (8.6 %[5.0 %-14.3 %]) et Campine (9.0 % [6.2 %-13.1 %]). La Campine et la Lorraine ont également été les régions les moins touchées par des pertes aussi en 2016-17, avec 17.5 % [13.9 %-21.8 %] et 21.1 % [12.5 %-33.5 %], respectivement.


Carte 1 : pourcentage de colonies perdues par commune. Attention, il faut bien se rendre compte que ces taux de mortalité sont basés sur les réponses reçues (parfois seulement quelques ruches pour toute une commune) et ne sont pas toujours représentatives de la mortalité dans l’ensemble de la commune...

L’analyse des réponses où la raison de la mortalité est précisée nous indique que 85.3 % des colonies étaient vides et donc perdues, 11.7 % étaient perdues suite à un problème de reines et 3.1 % suite à un désastre naturel.

Des questions, encore des questions...

Le questionnaire COLOSS inclut aussi de nombreuses questions sur l’environnement du rucher ou sur votre pratique apicole notamment l‘origine de vos cires (du commerce ou recyclage interne), la ou les méthodes de lutte utilisées contre la varroase, etc. Répondre à toutes ces questions peut sembler fastidieux mais ces questions supplémentaires sont intéressantes à plus d’un titre. Elles permettent de mieux comprendre le contexte dans lequel évoluent ces ruches et d’étudier leur effet sur les mortalités hivernales au niveau Européen. Elles permettent aussi d’avoir un instantané des pratiques apicoles en Belgique et de voir éventuellement une évolution dans ces pratiques au cours du temps. Le fait de répéter ces questions d’an
née en année permet aussi de voir si les résultats obtenus une année se confirment les années suivantes. Il n’est pas possible de présenter chaque année le détail de ces réponses. Nous avons fait le choix de vous présenter une sélection des faits les plus saillants.

Calendrier des traitements varroa

Parmi les questions COLOSS, on vous demande quels traitements vous utilisez contre la varroase mais aussi quand vous les appliquez. Ces résultats sont résumés dans les graphiques A et B pour les 458 réponses utilisables à cette question. Ils vous permettront de comparer votre pratique à celle des autres apiculteurs...


Parmi les moyens de lutte les plus fréquents, on trouve des pratiques biotechniques au printemps (cadres à mâles, création de ruchettes) et des traitements à l‘acide oxalique en hiver comme il se doit. Les autres traitements se concentrent en été, en particulier des traitements à l’acide formique et au thymol pour les traitements « bio » et avec l’amitraz en bandelettes pour les produits de synthèse.

Lien entre les mortalités, l’origine de la cire et les traitements varroa

L’année dernière, nous avions observé une mortalité significativement plus grande chez les apiculteurs utilisant la cire du commerce (mortalité moyenne de 28.1 %) par rapport à celle signalée par ceux utilisant leur propre cire (mortalité moyenne de 20.7 %). Par contre cette année (2017-2018) aucune différence significative de mortalité hivernale n’a été observée selon l’origine de la cire.

En revanche, comme l’année passée, les apiculteurs qui rapportent l’utilisation de produits de synthèse (amitraz, fluva linate, flumétrine) pour lutter contre la varroase rapportent également moins de pertes hivernales : de 26.8 % de mor talité sans traitements de synthèse on passe à 10 % de mortalité avec pro duits de synthèse en 2017-2018. Et comme l’année dernière, on n‘observe pas de différence statistiquement signi ficative selon l’utilisation de pratiques biotechniques ou de produits « bio » (par ex. acide oxalique, acide formique, thymol,...).


Une explication plausible d’un tel résultat, très significatif et répété sur deux années, serait que les traitements à base de chimie de synthèse sont plus efficaces que les autres traitements pour contrôler les varroas. Mais attention à ne pas tirer de conclusions trop hâtives ! D’autres explications sont plausibles et la prudence est de mise en particulier avec les résultats d’une enquête en ligne… Par exemple, l’utilisation de produits de synthèse est beaucoup plus rare et les 19.1 % d’apiculteurs qui déclarent appliquer ce genre de traitements diffèrent sans doute aussi par d’autres aspects de leur pratique qui pourraient contribuer à des pertes moindres. Les produits « bio » quant à eux recouvrent un large panel de produits dont certains peuvent être efficaces et d’autres pas. Lorsqu’on les regroupe dans une seule large catégorie comme ici, les pratiques « efficaces » pourraient être noyées dans les pratiques « inefficaces » et donner un résultat non significatif.

Lorsqu’on examine les résultats pour les 19 types ou de produits de traitement possibles sans les regrouper, on constate par exemple que les api culteurs qui rapportent spécifiquement l’usage d’acide oxalique parmi les traite ments « bio » - c’est le traitement « bio » le plus fréquent - rapportent également des mortalités significativement plus faibles : on passe de 30 % de mortalité sans aucun traitement à 22 % de mor talité avec acide oxalique et on tombe à 7-16 % avec les produits de synthèse. De plus le moment du traitement et la combinaison de plusieurs traitements « bio »et de pratiques biotechniques sont sans doute cruciales pour un contrôle efficace mais sont difficiles à prendre en compte dans une telle enquête...

Le mot de la fin

Nous tenons à vous remercier pour vos contributions et vous encourager à continuer à répondre au questionnaire que nous proposons année après année.